Cette semaine dernière doit être marquée de trois cailloux blancs. Le premier pour la magistrale réplique des troupes de l’Axe à l’orgueilleuse tentative de débarquement anglais sur les côtes de France. D’aucuns diront qu’il est malséant de la part d’un Français de louer l’occupant qui impose l’ordre sur notre territoire. Il faut leur répondre qu’à défaut d’une armée française pour protéger notre sol des appétits anglo-saxons, nous sommes heureux de voir le continent défendu par la seule armée européenne dont l’idéologie soit valable. C’était sur les côtes de la Manche qu’il fallait établir autrefois notre ligne Maginot. Mais la mode était de regarder de l’autre côté du Rhin, là où les Juifs et les vieux germanophobes latins nous désignaient l’ennemi. Les Français n’ont pas de souvenirs. Napoléon, lui, ne s’était pas trompé. Il rêvait la destruction de l’île des pirates, tout autant que la fédération des peuples européens. Appréciation juste des choses. Notons, disons et propageons aussi, que les troupes assaillantes du 19 août n’étaient pas anglaises. Albion fait toujours battre les autres. On ne pense pas pourtant que, cette fois-ci, elle puisse tirer les marrons du feu.
Le deuxième caillou blanc est la parution du livre de Lucien Rebatet : Les Décombres. Sans vouloir empiéter sur la tâche du critique de L’Appel, il me faut signaler que ce livre est beaucoup plus un acte politique qu’un récit. Non seulement l’auteur de Les Décombres réduit à néant les multiples efforts des profiteurs acharnés de la défaite, de la révolution nationale ou autres affairistes politiques, mais il ose dessiner pour l’avenir le chemin étroit, discipliné, hérissé d’obstacles et de préjugés à vaincre, qui doit mener la jeune France a une victoire sur elle-même, à la conquête de sa place dans l’Europe future. Rebatet a l’avantage d’être un fasciste d’hier. En 1940, le spectacle de la défaite n’était pas beau. En 1942, celui de la décomposition de toutes les sectes, de tous les partis, de tous les comités et de toutes les sacristies, de tous les édifices bourgeois, capitalistes ou politiques, de toutes les chapelles, bigotes ou laïques, est encore plus pénible. La France de Guizot, de M. Thiers, du faubourg Saint-Germain, de Marc Sangnier , des Ronchonnot et des pharaons de la finance, aura été au bout de la lâcheté. Elle aura trouvé son accusateur et son flagellateur.
Le troisième caillou blanc est une grosse surprise pour nous deux. M. Marcel Déat a révélé tout à coup qu’il comprenait le problème de l’anti-maçonnisme de la même façon que l’ont toujours envisagé ceux qui se sont rendu compte de la nocivité de la secte. M. Déat a décidé de lutter contre l’esprit de ce qu’on considérait justement comme l’armature de la défunte République. M. Déat a eu raison d’ouvrir les yeux, de crier à ses camarades et ses adhérents qui furent ancienne gauche qu’un régime nouveau ne tolérerait plus de comité politique secret, de clubs libéraux pro-juifs, de loges agissantes. Il l’a dit précisément ; mais nous voyons bien où obligatoirement, dans quelque temps, sa pensée, poussée dans ses derniers retranchements, ne va pas manquer d’aboutir. Car M. Déat est trop sincère avec lui-même pour ne pas s’apercevoir qu’un certain nombre de questions politiques et métaphysiques sont liées à la question maçonnique, telles les notions de démocratie ou de laïcité, pour ne citer que ces deux-là. Faire preuve d’anti-maçonnisme exige donc, sur ces points essentiels, une attitude constructive, une action positive dans un sens opposé à celui que la République d’hier, anti-spiritualiste et démagogique, suivait avec obstination.
La maçonnerie luttait, non seulement contre l’Église (et j’ose dire que s’il s’agit de lutter contre le cagot, contre le curé gaulliste, contre le tartuffe marmonneur d’oraisons et prêcheur inutile, contre l’hypocrite protecteur de judaïsme et de Juifs, nous en sommes, et des premiers), mais aussi, mais surtout, contre le spirituel, contre l’esprit chrétien aryen, contre la recherche métaphysique, contre la liberté de l’homme-Dieu. Et, pour lutter plus efficacement contre ce qu’elles estimaient être une fantaisie personnelle, une croyance de l’individu, une rêverie sentimentale, une spéculation de l’esprit, elle recommandait avec insistance la méthode dite de laïcité, de neutralité dubitative, de non-immixtion, de non résistance. On n’est pas plus adroit ni plus fourbe. Car, en matière spirituelle, douter, c’est nier ; discuter, c’est détruire ; examiner objectivement, c’est ruiner l’enthousiasme. Or, la connaissance, (et non la foi) ne peut pas se passer de cette ardeur renouvelée du perpétuel néophyte avide de savoir, d’explorer le monde métaphysique comme le physique, d’expérimenter l’esprit.
Les théoriciens imbus de leur positivisme définitif, les sociologues amateurs de réalités terrestres, les polytechniciens pour qui la technique est une fin en soi et dont le premier et le dernier amour est une locomotive, souriront à ces naïvetés, ces exubérances éthiques qui, d’un autre côté, feront grincer les dents aux conformistes, suppôts du dogme. Entre citoyens de sacristie et citoyens de Sorbonne laïque, nous faisons figure de piètres réformateurs démodés, dans un monde secoué de grands frissons dits révolutionnaires qui rident la peau du XXème siècle bourgeois, bienfaisant et mal élevé, ignorant la contexture et les ramifications du théos. Et pourtant, on ne saurait construire un monde nouveau, une Europe nouvelle unie, une France neuve, une génération saine, sans suivre la voie par laquelle il faut atteindre la régénération, le renouveau. C’est pourquoi est regrettable l’erreur de nos aînés qui, par réaction contre le conformisme clérical au religieux, ont refusé d’apprécier en eux-mêmes les principes de vie supérieure qui devaient les conduire à des conceptions sociologiques infiniment plus intéressantes. C’est pourquoi un des problèmes principaux du nouveau régime est : « Sera-t-il laïc ou non ? Quelle attitude aura-t-il devant le problème métaphysique ? L’esquivera-t-il ou bien le laissera-t-il expliquer par ceux qui continuent leur œuvre sacerdotale périmée ? ».
Et c’est là où nous suivons tel fascisme qui inclut à la fois science physique et spiritualisme. Quand les vieux républicains démocrates, les pourris de l’anticléricalisme, la bande de valets aux ordres de richissimes socialistes (socialistes pour trust, valets radoteurs, amateurs de graillon journalistique, professionnels de l’injure, de la diffamation et de la courbette jusqu’aux chausses ministérielles), quand la clique maçonnique peureusement réfugiée dans ses embuscades de la presse parisienne nous hurle aux oreilles qu’elle craint les curés et qu’elle ne veut pas le crucifix sur le mur des écoles, nous savons bien de quoi il retourne. Nous détestons plus que quiconque l’esprit de résignation et ses refoulements mystiques. Nous ne sommes pas les hommes des bondieuseries, des statuettes de plâtre de la rue Saint-Sulpice, des chuchotements antieuropéens dans les confessionnaux. Notre christianisme n’est pas noir. Il refuse tout masochisme, toute subordination à l’idole. Il prétend au courage, à l’ordre, à l’intelligence, au don de soi-même à la nation, à la connaissance exacte du principe créateur de l’homme et de l’univers ; il est l’individu en action, selon les lois immuables d’une perfection au mouvement qui oblige à se dépouiller des dogmes et des contingences, et qui n’admet toutes les techniques matérielles, au même titre que toutes les intuitions immatérielles que lorsqu’elles sont continuellement renouvelées par la preuve quotidienne de l’expérience. Le fascisme est l’application sociale de cette religion de l’homme réel, de cette science de l’être. Être fasciste (ou national-socialiste) si nous avons bien compris nos maîtres, c’est se multiplier socialement, participer à toutes les activités nationales, en revendiquant toutes ses responsabilités, en développant toutes ses énergies les plus hautes. C’est sentir en soi-même grandir le principe de puissance, moteur mental, moral et social. Est-il tâche plus grande ? Devoir plus pressant ? Religion plus élevée ? Grandeur de l’individu, grandeur de l’État, double but. Mais quels moyens de grandir si, à la base, on a imposé aux citoyens d’être neutres (laïques) sur l’essentiel principe ?
Qu’on ne nous fasse pas dire le contraire de ce que nous pensons. Nous ne demandons pas le catéchisme à l’école. Nous demandons, au contraire, une connaissance très exacte des religions anciennes et de leur développement moderne, non pas enseignée à la manière humoristique de nos athées d’hier : radicaux-socialistes, cracheurs de saleté, mais par des maîtres impeccables qui en dégageront le sens éternel et prestigieux. On aboutira ainsi à des surprises. On n’y verra que le christianisme, dépouillé du judaïsme qui l’a infecté, rejoint les vieilles religions aryennes, sur quoi se bâtirent tant de sociétés ou civilisations fameuses. On n’y verra la part de l’aryanisme dans notre Moyen Âge. On découvrira que, seule, la race blanche porte en elle-même la lumière de la connaissance métaphysique. On comprendra pourquoi récuser le Juif. On y retrouvera le sens de l’homme que nos sociologues matérialistes avaient enseveli sous les décombres des symboles maçonniques. On n’y gagnera la paix et l’ordre de l’esprit.
Fasciste, oui ! Théiste, oui ! Les deux se multiplient.
Paul Riche