Mercredi 12 janvier 1949
Ma chérie,
J’ai vu Leroy aujourd’hui. Bonne conversation. Il m’a remis la note et sa plaidoirie. Il va préparer le recours.
Je lui ai dit tout l’intérêt qu’il y avait à ce que le pourvoi traîne un peu —autant qu’il faut. Veux-tu bien voir cela de ton côté. Flo. peut-il faire qq chose ? Nous n’avons pas du tout la bougeotte. Prudemment, il faut attendre.
Ce mot donc pour que tu sois au courant de la marche à suivre, agir en conséquence. Ce matin L. n’avait pas l’air d’être très affirmatif sur ce point. C’est le principal. Nous ne cherchons pas la générosité des hommes, mais le reflux des événements. Nous ne sommes pas des sentimentaux, mais des politiques. Pour pouvoir en sortir plus vite, il faut louvoyer.
Il m’a fait part d’une de ses craintes au sujet d’événements possibles dans qq temps —et de l’urgence qu’il y aurait à obtenir la grâce immédiate. Je suis plus apaisé que lui. Laissons courir le flot. On ne prendra plus d’otages. L’heure est dépassée.
J’écrirai plus longuement en fin de semaine. Bien reçu mandat. Merci. Observe mes consignes à ce sujet. Naturellement j’embrasse Frédéric. Trois fois pour une. Ne t’inquiète en aucune façon de la dimension illimitée des affections familiales. C’est du solide. Tu peux dormir sur cet oreiller puissant d’une tendresse si profonde qu’on ne l’épuisera pas.
Une seule demande de ma part. Écris. Une autre encore : écris. Et si possible j’en ajouterai une troisième : écris.
C’est tout. Mon bonheur sera complet.
Tous mes baisers.
J.
PS. As-tu tapé la plaidoirie et la note en suffisance ? Voir lettres précédentes.