La dernière lettre

Mardi 29 mars 1949 – Prison de Fresnes

6h10 : La porte de la cellule 1/46 du quartier des Condamnés à Mort s’ouvre.

  • Le Directeur de la Prison entre, accompagné de Maître Pierre Leroy et d’un commissaire de Police.
  • Il réveille mon père et lui annonce que sa demande de grâce a été rejeté par le Président de la République, Vincent Auriol.
  • Il l’informe que la sentence va être exécutée sans tarder.
  • Jean Mamy demande a s’entretenir avec le pasteur.
  • On l’autorise à écrire UNE lettre, la dernière, à la personne de son choix.
  • Il prend la lettre que sa mère lui avait écrite quelques jours avant  « pour le matin du départ » :

Envoyée pour le matin du départ

Mon Jeannot chéri

Comme Dieu est bon de nous avoir appris par la Science Chrétienne que nous vivons éternellement par Lui et en Lui.
Je suis heureuse de pouvoir m’élever dans cette grande voie, ce grand chemin de la Vérité, de la Vie, de l’Amour.
Toujours unis nous sommes en Dieu. Ton élévation sera la mienne dans le grand plan de Dieu.
Je suis bien en Dieu avec toi.
Nous nous aimons pour l’éternité.

Ta maman; Marie, +baiser

P.S. Je remercie Dieu de la compréhension qu’Il te donne dans son grand Amour. Enfant bien aimé tu es béni pour toujours.


Jean Mamy répond au verso ces quelques lignes qui seront remises à sa mère :

Le matin du départ

Chère petite maman

Je suis dans toute la paix et la joie.
J’ai compris que l’épreuve par où jje passais était démonstration.
Il était nécessaire que je prouve pour beaucoup, qu j’ouvre un chemin, que je suive le chemin vers l’ascension  par où nous devons tous passer, que je montre à tous ceux qui regardent ce que peut la parole, la Parole.
Tu trouveras dans le petit cahier bleu mes dernières notes métaphysiques.
Je n’ai jamais eu de semaine plus belle. Et je vais vers la Vie éblouissante éternelle. C’est le mal qui ment. Le Bien ne ment pas.
Je t’embrasse. Embrasse-les tous. Je reste avec vous pour toujours. Le JE, le Moi, le Nous est éternel. Et après avoir vaincu beaucoup, il nous faut vraiment vaincre le dernier ennemi, qui n’est pas un ennemi.

Ton fils, J.

Mon Bernard sur mon cœur.


6h48 : il quitte la prison de Fresnes.
7h05 : il est fusillé dans les fossés du Fort de Montrouge, on « ramasse ses restes ».
7h25 : il est inhumé au cimetière parisien de Thiais.