Le Haut patronat, à la broche !

Au Pilori, 8 mai 1941, signé Paul Riche

Vichy continue à bafouer la France.

La bande de hauts requins qui fut à l’origine de nos malheurs, qui, pendant des années, suscita, pour s’en engraisser, les dévaluations de notre franc, qui, par ses dégoûtantes spéculations, fut le plus légitime prétexte à l’agitation communiste, qui, sciemment, nous poussa la guerre, sans vouloir la préparer, se pavane encore, le col haut, dans les coulisses du soi-disant État de Vichy.

En 1939, quand cet imbécile de Daladier, abruti de Pernod, eut malgré tout la force d’imposer au grand patronat la réduction jusqu’à 5% de ses bénéfices de guerre, ce fut un tollé de plastrons. M. de Wendel prit la parole au Sénat pour protester : « Cinq pour cent ! Pour qui prend-on les hauts bourgeois français ? Pour d’honnêtes gens, peut-être ? Pour des patriotes ? Pour des chrétiens ? On s’est trompé ! Il n’en est rien ! Nous avons heureusement de perfides moyens de parer à ces restrictions, indignes de notre passé de glorieux voleurs ! »

Et les sieur de Wendel d’ameuter la clique des repus contre cette volonté abominable  socialiste de juguler les trusts.

Des ordres stricts furent donnés aux grands patrons français : pas de bénéfices de guerre, pas de matériel de guerre !

Mais la France, dans tout ça ?

La France ? Eh bien, qu’elle paye ! Si elle ne payait pas, tant pis pour elle.

On travailla au ralenti. On nous donna des canons sans obus, des avions sans moteur, des fusils sans cartouches.

C’est ainsi qu’on perdit la guerre ! On aurait voulu la perdre qu’on aurait pas agi autrement.

Pas beaucoup de dégâts : quelques villes rasées ! Cent mille morts ! Deux fois rien.

Ces cent mille morts français n’auront pas pesé plus lourd dans les souvenirs de ces bandits de la finance qu’un banco à Deauville.

On prit sa grosse auto, les bijoux de madame, les clefs de la villa, et on s’en fut vers le Sud.

Il y avait encore des plages où attendre la fin de la bourrasque, en fumant des cigares.

Puis, nos grands seigneurs de l’électricité, de la métallurgie, des filatures, remontèrent sur Vichy. Ils y retrouvèrent leurs fauteuils-club et leurs Juifs : le Tout-Paris des dents longues.

C’est alors que les grandes conspirations commencèrent.

La débâcle de 1940 aurait pu apporter à ces minuscules milliardaires des idées neuves en matière de construction sociale. Une révolution juste pouvait se faire par en haut. Il aurait été curieux pour nous, après avoir tant médit de l’égoïsme patronal, que nous soyons démentis et qu’une saine conception d’un ordre communautaire remplaçant tout à coup l’ancienne anarchie oligarchique, soit venue nous frapper d’une chiquenaude aimable. Il n’en fut malheureusement rien. Nos prophéties de malheur étaient justes.

Ces requins n’étaient que des charognards.

Vichy n’a pas seulement consolidé les intérêts capitalistes existant avant 1939 . Il a créé une caste nouvelle née de la défaite, celle des grands comités d’organisation.

Ce haut patronat multimilliardaire, mais affameur de prolétariat et créateur de chômage, prétend prendre en main la direction industrielle et commerciale d’un pays à bout de souffle qu’il a lui-même ruiné. Ces faillis se font organisateurs. Ils ont casé leurs hommes à tous les étages de cette caricature d’État. Ils ont construit un édifice mirobolant de fausses corporations sociales. Tout le confort des apparences y est prévu : organisations ouvrières, assurances, primes, grands travaux, congés payés, toutes choses arrachées à coups de grèves ces dernières années et consenties majestueusement aujourd’hui par ses ventrus jouant aux philanthropes. Il n’y manque que l’indispensable consentement de la nation.

Il manque surtout l’équilibre dans les répartitions. Il y manque la justice il y manque l’honnêteté créatrice.

On ne construit pas un État sur un système financier ploutocratique. L’or national détenu par quelques doigts crochus ne peut commander la masse des nationaux. La détention de quelques milliers de coffres-forts plus ou moins bien acquis ne constitue pas la puissance. Le mouvement du peuple, son enthousiasme à construire, son ardeur à repousser les maux qui l’assaillent, sa volonté de créer, sont le seul potentiel national. Le reste n’est qu’un symbole non appropriable.

Mais ces dorés sur tranche n’ont jamais rien su, ni rien appris. Ce sont des outres pleines d’orgueil, de formules et de chiffres.

Ces coquins se sont enfermés dans une tour d’ivoire financière croyant naïvement que leur système social mirifique, enfanté par des polytechniciens imbibés d’occultisme juif, pouvait coïncider avec les intérêts réels de la France.

Sourds au cri du peuple, n’écoutant que la voix aiguë de la haute finance : Londres, Wall-Street, l’amiral Leahy et Radio-Washington, ils ont continué à faire œuvre de pillards et de comptables, de bourgeois immodestes et gavés, se disant cyniquement que les Français se contenteraient encore de leur allocation de chômage et des surprises de la Loterie Nationale.

Gagner du temps voilà leur tactique ; c’est toujours ça de gagné.

Nos capitalistes sont des enfants en jaquette, chapeau melon et compte en banque. Nous avons déjà vu dans ce pays des aristocraties plus prestigieuses être jetées par-dessus bord sans ambages.

Nous ne souhaitons pas à nous vichyssois que des coups de balai.

Ces niais n’ont pas compris qu’ils ne vivaient que sur le prestige ténu de la réussite très éphémère de leurs grands-pères. La République 39 attaquait bien le capitalisme, mais elle y croyait encore. Les radicaux, les socialistes, voire les communistes, le soutenaient comme un vieillard malade qu’on ne saurait décemment tuer et dont on attend patiemment le dernier soupir. Aujourd’hui, la fuite de notre or aux États-Unis nous a lavés de nos soucis d’argent. La révolution ne s’est pas faite dans la rue. Elle s’est faite dans les esprits. Hier, nous n’imaginions pas pouvoir vivre sans cette fameuse réserve de métal à la Banque de France, qui gageait notre papier. Cette béquille aurifièe a disparu sans que nous en souffrions. C’est donc que nous n’en avions pas besoin. Voilà un la véritable révolution nationale.

Et c’est aussi pourquoi Vichy-Trust, sans le savoir lui-même, s’est suicidé et sans bruit.

Ce petit îlot d’insensés capitalistes agonise dans l’illusion qu’il gouverne l’univers au moyen d’ondes bancaires magiques. Un jour prochain, on coupera le contact. L’Îlot se résorbera, vivra quelque temps sur lui-même, mangera les dernières vignettes numérotées de ses caisses de titres précipitamment sauvés, et ce sera fini.

Mais le peuple déchaîné, furibond, monstrueusement dressé, se souviendra vivement du mal qu’on lui a fait. L’avoir poussé à la guerre, lui avoir tué cent mille de ses fils, avoir gâché trois ans de la vie de deux millions d’autres, avoir consenti à l’Angleterre et à l’Amérique un blocus évitable, avoir refusé la collaboration, voire le renversement des alliances qui nous plaçaient en meilleure posture pour signer la paix, avoir protégé sans cesse les responsables de la guerre, avoir affamé les Français, avoir accaparé l’essentiel des denrées et des matières premières, avoir profité de la défaite pour constituer une mafia compacte de financiers avides, après avoir tué la France, avoir voulu, comme des nécrophages, s’en repaître jusqu’à l’assouplissement de sa fin immonde, voilà les crimes qu’on ne pardonnera pas aux hommes de la sépulture de la République.

Les noms de ces bandits sont tous connus. Les listes sont dressées. Elles ne comprennent pas que des sous-ordres. Les parlementaires paieront pour eux-mêmes, mais ils ne sont que les valets vous de la haute banque. Les jésuites, les badernes vétustes, les dignitaires des obédiences, les Juifs, la haute finance, sont pris en flagrant délit de machiavélisme : ils ont voulu forcer la France à vivre sous la chaussette à clous, sous l’étreinte de l’or, sous la férule de l’hypocrisie. Nous armerons le peuple de cette trique dont nous recommandions l’emploi l’autre jour contre les imbéciles qui prêtent l’oreille à l’anglais. Nous caresserons avec joie les épaules de cet épouvantable grouillis de bienséants de Vichy qui s’imaginent avoir mérité le respect de la France, parce qu’après avoir falsifié les livres de comptes et les textes législatifs, ils se sont assis sans pudeur sur le canapé encore chaud de la République complaisante et assassine. Ces bourgeois sont cuits, ou plutôt à cuire : à la broche ! À la broche !

Le haut patronat est un abcès dans la nation. La France le crèvera le jour où ce prurit sera devenu sa plus de préoccupation. Dans l’intérêt du pays, qu’il vienne donc vite, le matin chirurgical de la délivrance véritablement révolutionnaire !

À la broche, le haut patronat juif ou autre !

Ceci compensera nos cartes de pain.

Paul Riche