Jeudi 27 janvier 1949
Mon chéri,
Un mot seulement pour te dire l’excellente impression qu’on a rapportée de la visite dont je t’ai parlé hier. J’en ai eu tout à l’heure l’écho, et je m’en réjouis. Je ne puis te répéter textuellement l’entretien —qui n’a pas duré moins de vingt-cinq minutes—, mais sache que l’accueil a été des meilleurs.
J’ai tenu Me Leroy au courant, et comme justement il voyait Cha. [1] ce soir, il se sentira plus fort pour plaider ta cause. Sois tranquille. Ça s’annonce bien.
Je ne crains qu’une chose, moi. C’est qu’un de ces jours —où tu trouveras encore « que la vie humaine ne t’offre pas de côtés riants, ne t’en a jamais beaucoup offert »— tu me reproches de ne pas t’avoir laissé fusiller. Si tu me fais ça, tu sais, alors je me fâche, et plus jamais je ne m’occuperai de toi.
Mais je crois plutôt, je suis certaine, que tu m’en remercieras, et qu’ensemble nous goûterons —nous ne goûterons— que tous les côtés riants de la vie. Il y en a pour tous ceux qui en veulent, des côtés riants. Je suis très heureuse ce soir.
Je t’embrasse. Vite te lire.
JR
Me Leroy me dit qu’il ira te voir fin de semaine.
[1] Probablement Me Jean Chaumanet (« mon jeune patron »). Jeanne Roux a été d’abord la secrétaire de son père, puis du fils (note de FGR)