Rive gauche
Ses parents habitent un appartement au cinquième étage de la rue de Jussieu dans le cinquième arrondissement de Paris, à deux pas de la rue des Écoles, de la Sorbonne et du Boulevard Saint-Michel.
Les deux fenêtres de leur balcon donnent sur Notre-Dame et les entrepôts de la, la Halle-aux-Vins, celle de Jussieu qui a été rasée pour y construire la Fac de Sciences, puis l’Institut du Monde Arabe..
Le jeune Mamy fréquente le Quartier Latin, Saint-Germain-des-Prés, les auteurs, les intellectuels, les acteurs…
Il fera ses premiers pas dans le théâtre avec Charles Dullin qui dirige depuis 1922 le théâtre de Montmartre qu’il vient de rebaptiser « théâtre de l’Atelier ». Il y rencontre Marcel Achard qui y avait débuté comme souffleur mais qui, doué de la voix adéquate avait été repéré par Dullin et était vite monté sur les planches pour y interpréter un des rôles de la pièce qu’il venait d’écrire : Voulez-vous jouer avec moâ ?
Régisseur et acteur au théâtre de l’Atelier de 1920 à 1931, Jean Mamy participe à la création de plusieurs pièces dont Knock et Six personnages en quête d’auteur.
Jean Mamy et Marcel Achard, presque du même âge, se lient d’amitié et font bande avec René Clair, leur aîné de quelques mois que Jean Mamy avait probablement croisé au lycée Louis le Grand.
Ces fréquentations, disons de jeunesse puisque Jean Mamy a à peine vingt-cinq ans, sont la base du développement intellectuel et social de Jean Mamy qui, au début des années 30, se fond dans la vie parisienne, les beaux quartiers, l’opulence, l’argent, la vie facile, les femmes…
C’est à ce moment qu’il rencontre Marthe Flavie Louise Valère, dite Barbara Val, une actrice plus ou moins frivole. Il l’épouse le 28 mai 1931 à Paris. Leur fils, Bernard, naitra le 13 décembre 1931.
Ils vivront séparés au cours des années 30 mais sans jamais divorcer et, 4 ans après sa mort, Barbara se remariera le 14 août 1953 à Cagnes-sur-Mer avec Robert Debeurre. Elle décédera le 12 mai 1990 à Cannes.
Jean Mamy profite de la vie parisienne. Il en jouit, plonge dans l’art cinématographique. Il fréquente le monde des artistes, des grands auteurs, des grands acteurs, parmi lesquels : Pagnol, Michel Simon, Jacques Prévert, Yves et Marc Allégret, Sacha Guitry, Jean Renoir, Roger Richebé… avec qui il va travailler comme monteur, réalisateur et producteur dans plusieurs films et notamment L’Agonie des aigles (1933) avec Pierre Renoir, Minuit, place Pigalle (1934) avec Raimu et L’Habit vert (1937) avec Jules Berry et Bernard Blier.
Syndicaliste
Homme de gauche, il se mobilise et représente les professionnels du cinéma. Il devient Président de l’Association Syndicale des Monteurs de Films, adhérente à la Fédération du Spectacle, C’est lui qui met au point, défend et fait accepter le « Contrat collectif des techniciens et spécialistes de la production du film ».
Dans son « testament politique », rédigé en prison, quelques mois avant son exécution, Jean Mamy explique les raisons qui l’on conduit à détester les communistes :
En 1936, les communistes m’éjectent d’un souffle de mon petit poste syndical. Du coup, leurs manœuvres font s’écrouler une situation intéressante que j’avais acquise chez un producteur de films où, comme d’habitude, je jouais indéfiniment le « nègre » (cuisinant tout à la fois : dialogue, mise en scène, régie, administration) pour un forfait modéré.
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C’est aussi probablement à cette époque que Jean Mamy rencontrera ma mère, Jeanne Roux, dactylo alors âgée d’environ 25 ans, dans des conditions dont je n’avais pratiquement aucune trace, si ce n’étaient quelques dizaines de pages tapées sans nul doute sur la machine à écrire Underwood de ma mère (les défauts caractéristiques de certaines lettres se retrouvent dans les tapuscrits de l’époque Fresnes dont il est certain que c’est elle qui les a tapés, jusqu’à je découvre et décrypte la lettre qu’il lui écrivit le 24 septembre 1945 depuis sa cellule de Fresnes.
Franc-maçon, vénérable de sa loge
Assez naturellement, Jean Mamy se rapproche des francs-maçons. Il est initié au Grand Orient de France et devient rapidement vénérable de sa loge, la loge Ernest Renan.
Toujours dans son « testament politique », Jean Mamy explique les raisons qui l’on conduit à la franc-maçonnerie.
En 1933, la franc-maçonnerie m’ouvre une porte secrète. Je m’y fourre avec le rugissement bienheureux du néophyte ébloui, et pendant des années, m’escrime avec les mots symboliques, les initiations, les poignées de mains fraternelles, et les discours à la gloire du Grand Architecte. Toutes ces expansions craquent généralement entre la troisième et la cinquième année.
Mais également celles qui l’ont poussé à s’en extraire, à en devenir un adversaire dont l’hostilité à cette société secrète ira grandissant, à développer son aversion pour la « juiverie d’affaires » et à se rapprocher du PPF de Jacques Doriot.:
En Maçonnerie, déception à la suite d’un vénéralat coupé de procès scandaleux : un médecin juif, mon vice-président d’atelier, se révèle condamné par les Assurances Sociales, entré frauduleusement en loge, patronné dès son arrivée par tous les hauts comités maçonniques qui s’entremettent pour faire rapporter la sentence. Démasqué, l’homme réagit furieusement, réussit à attirer à lui un certain nombre de pontifes bien couverts de sautoirs, à voix retentissante, aux larmes philanthropiques. Je démissionne deux fois. On me rattrape toujours avec le mensonge de bonne amitié.
[…]
En France, à gauche : deux pôles d’attraction se disputent les masses : la franc-maçonnerie et le Parti communiste.
[…]
La franc-maçonnerie française se divise en deux obédiences concurrentes et alliées : la Grande Loge et le Grand-Orient. Ces sœurs siamoises se détestent et se complètent hypocritement. La Grande Loge prétend rester dans la pure tradition écossaise du symbolisme hermétique. En fait, sous des apparences plus libérales, elle favorise la diffusion du marxisme tout autant que le Grand-Orient, rouge. En 1937, adhésion intégrale de la franc-maçonnerie française au Frente Popular. De même, en 1936, elle avait autorisé ses vedettes à pérorer sur les tribunes aux côtés des soviétiques.
Jusqu’en 1940, elle a la direction absolue du parti SFIO et du Parti radical socialiste. Elle déborde même sur la droite. Toute puissante au Sénat. Elle tient l’Intérieur, l’Éducation Nationale, les PTT, le Travail. Grosse influence dans l’Armée (les Officiers nationalistes sont toujours fichés). La Police lui est dévouée. Aux affaires Étrangères, elle a ses hommes. Cette minorité occulte de petites gens, en apparence faible (25 000 assidus sur 50 000 inscrits) tient dans ses mains les destinés du pays. Rien ne se fait sans elle ni contre elle. Elle est —dit-on— l’âme de la démocratie. Plus exactement, elle est la clef —et la serrure— de toutes les organisations de gauche, comme de tout le système parlementaire.
Les influences juives l’aiguillent vers les pires solutions révolutionnaires. À Paris, sur 10 000 maçons, 3 000 juifs, tous assidus, acharnés, extrémistes, travaillent à la neutralisation du « pays réel » qu’ils ne contrôlent pas encore assez à leur gré. Ils partent à la conquête du pouvoir, pour y placer leurs congénères, leurs amis, leurs complices, sachant que, par l’impôt et par la loi, on dirige un peuple vers l’asservissement convenable.
Les méthodes maçonniques sont parfaites pour arriver à cette infiltration des médiocres qui exige décomposition préalable. Il ne faut que socialiser la République. Dès lors, le gang opérera sans opposition.
La Maçonnerie est le cheval de Troie du communisme.
[…]
La Maçonnerie française est la responsable de la défaite de 1940. Je suis un des rares témoins qui puisse l’affirmer. Il ne faut que m’appuyer sur mes souvenirs.
– Responsable pour son action générale depuis vingt ans,
– Responsable directement par les actions précises de ses chefs.
La mobilisation de 39 mettra une fin à cette période.